Le bois énergie est au cœur des stratégies nationales de la transition énergétique. Le nombre de ménages français chauffés au bois atteint 7,4 millions, selon une étude de l’ADEME publiée en octobre 2023. Le chauffage au bois, s’il utilise des appareils performants, est l’une des pistes principales pour réduire les émissions de CO2 (le bois captant du CO2 lors de sa croissance) liées à l’énergie, et réduire la dépendance française aux énergies fossiles et nucléaire. Fait méconnu, la « biomasse » est déjà de très loin la première énergie renouvelable dans l’Hexagone (près de la moitié du total des renouvelables) et le monde.
Le chauffage au bois est-il un danger pour la santé ?
L’utilisation du bois comme source d’énergie fait l’objet de nombreuses critiques, en raison des particules fines qu’elle émet. De nombreuses tribunes sont publiées à ce sujet, notamment par des médecins, qui alertent sur les risques du chauffage au bois sur la santé.
Effectivement, si l’on observe seulement les émissions de particules, le bois n’est pas la meilleure source d’énergie. Ces particules fines constituent un enjeu sanitaire réel. Cependant, si cela concerne les installations anciennes, les cheminées et les vieux poêles, les dernières générations de poêles émettent extrêmement peu de particules fines et sont très performantes en termes de production de chaleur. La priorité pourrait donc être la modernisation des systèmes de chauffage au bois anciens, plutôt que le remplacement par des énergies beaucoup plus émettrices de CO2…
Quel est l’impact réel du chauffage au bois sur le changement climatique ?
Maintenant, si au lieu de comparer le bois aux autres énergies sur la seule base des émissions de particules, on s’intéresse par exemple à l’impact sur le changement climatique, le bois est largement préférable à ses concurrents.
Ainsi, dans un rapport publié par l’ADEME en janvier 2022, une comparaison est faite entre le bois et le gaz :
- L’impact du bois énergie sur le changement climatique est très largement inférieur à celui du gaz naturel.
- La production d’un kWh d’énergie thermique à base de bois émet de 11 à 30 g d’équivalent CO2, contre une émission de 290 à 400 g dans le cas du gaz naturel
- L’impact du bois énergie sur l’utilisation des ressources fossiles est aussi très largement inférieur à celui du gaz naturel.
Comparer le bois, le gaz et le fioul sur la seule base de leur impact direct sur l’environnement constitue une erreur de raisonnement. Il convient plutôt de considérer l’impact causé par tout le cycle de production de ces énergies. Et en faisant le bilan sur l’ensemble du cycle de production et du transport, les chiffres présentés dans un rapport de l’ADEME de 2018 sont largement favorables au chauffage au bois :
Émissions de CO2 par énergie de chauffage pour la consommation d’1 kilowattheure :
- Chaudière à bois : 30 gCO2e/kWh
- Pompe à chaleur : 49 gCO2e/kWh
- Réseau de chaleur : 100 gCO2e/kWh
- Radiateur électrique : 147 gCO2e/kWh
- Chaudière à gaz : 227 gCO2e/kWh
- Chaudière au fioul : 324 gCO2e/kWh
Les principaux avantages du chauffage au bois
- Économique : Le bois est souvent moins cher que les autres combustibles fossiles ou l’électricité, surtout si l’on a accès à une source locale à un tarif raisonnable.
- Renouvelable : Le bois est une ressource renouvelable, lorsqu’il provient de forêts gérées de manière durable, contrairement aux combustibles fossiles.
- Indépendance énergétique : Utiliser du bois pour se chauffer peut réduire la dépendance aux fournisseurs d’énergie et aux fluctuations des prix du marché de l’énergie.
Le sujet est très complexe, car aucune énergie n’est parfaite, mais on ne peut surtout pas comparer plusieurs sources d’énergie sur la seule base des émissions de particules. Certes, le problème lié aux particules fines dans l’air est préoccupant, mais que dire des problèmes beaucoup plus graves, liés aux émissions de CO2, qui sont la cause du changement climatique actuel ?
Il existe des différences considérables d’émissions de particules entre les vieux poêles à bois à foyer ouvert et les systèmes les plus récents qui émettent beaucoup moins de particules (le rapport est de 1 pour 30).
Une solution écologique
Le bois est considéré comme une source d’énergie de chauffage relativement peu polluante en France, surtout lorsqu’il est utilisé de manière durable. Le chauffage au bois peut être une option écologique pour plusieurs raisons :
- Bilan carbone neutre : Théoriquement, le bois est une source d’énergie renouvelable qui peut avoir un bilan carbone neutre. Cela signifie que la quantité de CO2 émise lors de la combustion est égale à celle que l’arbre a absorbée durant sa croissance. Ainsi, si la gestion forestière est raisonnée et fait en sorte que nos forêts restent des puits de carbone, l’impact sur les niveaux de CO2 atmosphérique peut être minimisé.
- Énergies locales : Utiliser du bois pour le chauffage favorise les ressources locales et peut réduire la dépendance aux énergies fossiles importées. En France, la filière bois est assez bien développée et contribue à l’économie locale, notamment dans les zones rurales.
- Technologies modernes : Les technologies modernes de chauffage au bois, comme les poêles à granulés de bois et les chaudières à bois à haute efficacité, ont considérablement amélioré l’efficacité énergétique et réduit les émissions polluantes. Ces systèmes peuvent offrir une combustion plus propre et plus efficace que les anciens appareils de chauffage au bois.
En résumé, bien que le bois puisse être une source d’énergie de chauffage moins polluante, surtout comparée aux combustibles fossiles, son impact environnemental dépend fortement de la manière dont il est produit, collecté et utilisé. Une gestion durable des forêts et l’utilisation de technologies de chauffage au bois modernes et efficaces sont cruciales pour minimiser son empreinte écologique.
Un expert : l’ingénieur bois énergie
A l’ENSTIB, la formation Ingénieur propose en 3ème année, une spécialisation en Bois Énergie. L’ingénieur bois énergie est un professionnel spécialisé dans la production, la transformation, et l’utilisation de la biomasse forestière en tant que source d’énergie. Ce métier se situe à l’intersection de l’ingénierie, de l’environnement, et de l’énergie renouvelable, jouant un rôle crucial dans la transition énergétique et la lutte contre le changement climatique.
Voici les principales fonctions et responsabilités associées à ce métier :
- Gestion de la biomasse : L’ingénieur bois énergie est impliqué dans la gestion durable des ressources forestières destinées à la production d’énergie. Cela comprend l’évaluation de la biomasse disponible et le développement de pratiques durables d’exploitation forestière.
- Transformation et valorisation : Il conçoit et optimise les processus de transformation du bois en différents produits énergétiques, tels que les bûches, les pellets (ou granulés), les plaquettes, ou encore la production de biogaz par méthanisation. Son rôle est d’améliorer l’efficacité énergétique et de réduire les coûts de production.
- Conception de systèmes énergétiques : L’ingénieur est également chargé de concevoir et de dimensionner des installations de production d’énergie à partir de bois (chaudières, centrales biomasse, systèmes de cogénération), en tenant compte des besoins énergétiques, des normes environnementales et de sécurité.
- Recherche et développement : Il peut travailler sur l’innovation de technologies plus propres et plus efficaces pour la conversion de la biomasse en énergie, ainsi que sur l’amélioration de la chaîne logistique du bois énergie (collecte, stockage, transport).
- Conseil et expertise : L’ingénieur bois énergie offre son expertise aux entreprises, collectivités, et décideurs politiques pour développer des stratégies d’énergie renouvelable basées sur la biomasse forestière. Cela inclut l’évaluation de projets, la réalisation d’études de faisabilité, et l’accompagnement dans l’obtention de financements et de subventions.
- Durabilité et impact environnemental : Une part importante de son travail consiste à évaluer et à minimiser l’impact environnemental des activités de production et d’utilisation du bois énergie, en promouvant une gestion forestière durable et en veillant à la réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Ce métier requiert une formation en ingénierie, idéalement spécialisée dans les domaines de l’énergie, des ressources naturelles ou de l’environnement, complétée par des connaissances spécifiques sur la biomasse, la technologie des énergies renouvelables, et la gestion durable des forêts.
Article rédigé par Flavie Najean, Enseignante, Responsable de la Communication de l’ENSTIB, en collaboration avec Thibaud Sauvageon, Ingénieur Bois et Docteur en Sciences du Bois et des Fibres, Chargé de la Communication du LERMAB