Difficile d’imaginer Épinal sans son « école du bois ». Pourtant, l’ENSTIB n’a que 40 ans. Et si cette composante de l’Université de Lorraine possède désormais de profondes racines dans la Cité des Images, son histoire repose sur la volonté et le dynamisme de quelques personnes qui, au fil des ans, se sont investies sans relâche pour développer l’école, son campus, ses effectifs et ses compétences. Ces efforts font d’elle aujourd’hui la seule école nationale publique des technologies et industries du bois.
De la maîtrise au diplôme d’ingénieur ESSTIB
Depuis 1978, une dizaine d’étudiants suivent la Maîtrise de Sciences et Techniques Bois, axée principalement sur une formation au « matériau bois » et dispensée à Épinal, dans les locaux du Centre d’Études Scientifiques Supérieures (CESS). Sous l’impulsion de Pierre Blank, maire d’Épinal, puis de Philippe Séguin, le ministère ouvre quelques postes d’enseignants-chercheurs prêts à s’investir dans la filière. Cela permet au petit groupe d’étudiants de monter en compétences.
En 1982, les premiers diplômés de la MST Bois trouvent rapidement des débouchés dans l’industrie régionale à des postes de responsabilité. Encouragé par ce succès, Xavier Deglise, alors directeur de la structure, demande la transformation de la MST Bois en une école d’ingénieurs.
En 1985, cette ambition se concrétise après l’audit favorable de la Commission des Titres d’Ingénieur (CTI) , soutenue par les industriels. L’École Supérieure des Sciences et Technologies des Industries du Bois (ESSTIB) est créée en avril pour une ouverture en septembre 1985.
Entre-temps, les effectifs progressent régulièrement, permettant une insertion professionnelle répondant à une demande industrielle croissante.
Philippe Séguin :
parrain de cœur de l’ENSTIB
Dès les 1ers instants, le Député Maire a fait preuve d’un engagement indéfectible à l’ENSTIB et à ses acteurs. Alors que le projet en était à ses débuts, quelques courriers bien sentis sont adressés à des détracteurs de la création d’une école d’ingénieurs à Epinal. Si certains osent écrire « qu’un jeune de 20 ans n’ira jamais s’enterrer pour 3 ans à Epinal », il répond que « leur mépris pour la province, dénote d’une mentalité d’un autre âge ». Quand d’autres, dans des ministères, écrivent « que la solution d’Epinal présente un grave danger, de par son environnement intellectuel » sa réplique est aussi cinglante qu’engagée : « Il est inadmissible, que sous couvert de labels République Française, Ministère de l’Agriculture, Institut National de la Recherche Agronomique, le premier irresponsable venu puisse porter sur l’environnement intellectuel d’une ville et d’un département de telles appréciations. »
Philippe Séguin a toujours été aux côtés de l’ENSTIB et de ses acteurs, ainsi est-il revenu sur le Campus Bois, à l’occasion de sa dernière visite à Epinal. La rue qui accueille l’ENSTIB a été baptisée rue Philippe Séguin, après son décès.
Des bancs de la Faculté à l’usine moderne
A ce moment-là, l’ESSTIB n’a toujours pas de locaux techniques spécialisés, malgré le soutien appuyé de Philippe Séguin aux équipes et élèves de l’école, dirigée par Xavier Deglise.
C’est alors que le syndicat mixte d’Epinal, rassemblant les villes d’Épinal, Golbey et la Chambre de commerce, propose une usine initialement prévue pour le chocolatier CEMOI, en vue d’héberger l’ESSTIB et sa halle de technologie. En effet, le chocolatier vient de cesser ses activités trois mois après l’ouverture de l’usine flambant neuve, à la suite de la mise en liquidation de la maison mère.
C’est le 16 septembre 1985 que la 1ère promotion de l’École supérieure des sciences et technologies des industries du bois (ESSTIB) fait sa rentrée à Épinal. Les 18 élèves ingénieurs occupent alors l’usine ex-CEMOI, un vaste hangar métallique ultra moderne de plus de 4600 m2.
L’école poursuit très vite son développement : un an plus tard est créé le Centre régional d’innovation et de transferts technologiques des industries du bois (CRITT Bois) qui joue le rôle d’interface entre l’École et l’industrie.
Changement de nom, pour une dimension nationale
En 1994, l’ESSTIB change de nom et devient l’ENSTIB : École Nationale Supérieure des Technologies et Industries du Bois. Ce changement marque une nouvelle dimension nationale, venant couronner de nombreuses améliorations tant au niveau des enseignements que des moyens mis à disposition des élèves et des locaux qui se développent pour répondre aux besoins croissants.
Le 8 mars 1996, de nouveaux locaux de plus de 1600 m² sont inaugurés. Leur pièce maîtresse est l’amphithéâtre Philippe Séguin, un cylindre de 20 mètres de diamètre et de 8 mètres de haut, incliné à 30 % et construit entièrement en bois (hêtre, sycomore et chêne). Ce volume, en équilibre sur un cube de béton, symbole de la technicité et de la performance du matériau bois, devient l’emblème de l’école.
Nouvelles directions, nouvelles ambitions
Pascal Triboulot, visionnaire et bâtisseur
En 1985, Pascal Triboulot est maître de conférences en génie civil et mécanique et, en parallèle, directeur des études de l’ESSTIB. En 1995, il devient directeur adjoint, puis directeur en 2000, poste qu’il occupe jusqu’en 2017 (avec une interruption de deux ans entre 2010 et 2012, lorsqu’il part au Québec).
Convaincu que l’ENSTIB a un rôle essentiel à jouer dans la filière bois, il multiplie les interventions en conférences et tables rondes, en France comme à l’étranger. Il s’attache à déconstruire les clichés liés à la filière bois et à la forêt. Sa vision, selon laquelle le bois et ses nombreuses applications constituent une réponse aux enjeux climatiques et environnementaux, contribue largement à la notoriété de l’ENSTIB.
En 2000, la Licence Professionnelle de l’ENSTIB est créée pour répondre aux besoins spécifiques de la filière bois. Cette formation s’enrichit ensuite de plusieurs spécialités adaptées aux évolutions des métiers du bois : structures bois et ameublement bois. Elle est désormais sous la responsabilité de Marc Jaffres, ingénieur ENSTIB et d’Alain Renaud, enseignant et propose une spécialisation expertise bois.
Parmi les infrastructures marquantes de son mandat figurent la construction, en 2001, du bâtiment regroupant le CRITT Bois et le CETELOR, puis la création du Campus Fibres (devenu Campus Bois) en 2005. En 2015, un bâtiment dédié à la recherche sur la valorisation énergétique du bois par gazéification, portée par le Pr Yann Rogaume, est inauguré.
En parallèle, le Master ABC (Architecture Bois Construction), lancé en 2006 (ancien DESS Matériau Bois et Mise en Œuvre) en collaboration avec l’École Nationale Supérieure d’Architecture de Nancy et l’Université de Lorraine, répond à la demande croissante de spécialistes dans la construction bois. Aujourd’hui sous la houlette de la Caroline Simon, enseignante chercheuse, responsable du Master ABC, la formation attire chaque année de nombreux candidats et donne une magnifique visibilité à la formation construction bois de l’école.
L’épreuve pédagogique créée dans le cadre de ce master « Les Défis du Bois », qui consiste à faire travailler ensemble ingénieurs, architectes et compagnons du devoir, contribue au rayonnement de l’école bien au-delà des frontières nationales, avec la participation d’étudiants venus du monde entier.
Autre diplôme, le CHEB, formation proposée en partenariat avec le Centre des Hautes Études de la Construction (CHEC), qui deviendra ensuite le diplôme Ingénieur de Spécialisation, voit le jour en 2004. Dans un premier temps, il est placé sous la direction des études de l’ingénieur Dominique Calvi, qui a calculé la structure de l’Amphithéâtre Philippe Séguin.
Laurent Bléron, l’amélioration continue
Diplômé de l’ENSTIB en 1997, Laurent Bléron devient professeur des universités dans cette même école en 2012. Depuis 2012, il est directeur-adjoint de l’ENSTIB, responsable des relations industrielles et stratégies de valorisation. Il est également responsable de l’équipe construction bois du Lermab et membre du comité de direction du laboratoire. Il a occupé la fonction de directeur des études de l’école depuis 2015.
Son projet pour l’école consiste à donner à l’ENSTIB de grands projets d’avenir, visibles tant sur le plan national qu’international et qui pourront asseoir le socle des formations technologiques, donner de nouveaux horizons aux activités de recherches menées par les laboratoires et plus généralement avec le monde socio-économique. Les projets de bio raffinerie, robotique, usine 4.0 devront s’inscrire dans le cœur de cible de l’école.
En 2017, au moment de sa prise de poste, l’ENSTIB, qui accueille désormais 400 étudiants par an, ouvre ses formations à l’apprentissage.
C’est au même moment que l’école développe une stratégie de communication.
Sous la houlette de Laurent Bléron, l’ENSTIB fait peau neuve : réfection complète de la halle, avec un réaménagement des machines, mise à jour de l’équipement d’usinage numérique, et mise en place d’une plateforme de bioraffinerie à une échelle de laboratoire.
Parallèlement à la réflexion stratégique menée avec Lorraine INP, l’ENSTIB fait évoluer son logo en février 2022, qui s’inscrit désormais dans une charte graphique commune au Groupe national INP, donner une visibilité plus forte à l’école au niveau.
Alors que se développe l’amélioration continue mise en place sur le Campus Bois, Laurent Bléron et Pascal Triboulot, lancent un « coup de gueule » au niveau national, pour poser la question suivante : Peut-on se passer de bois ? Ce dernier est vu des centaines de milliers de fois sur Internet.
Parmi les nombreux médias qui s’emparent du sujet, l’Est Républicain publie une interview du directeur.
L’ENSTIB aujourd’hui
Aujourd’hui, l’ENSTIB est l’une des 11 écoles d’ingénieurs du Collegium Lorraine INP. Depuis sa création en 1985, elle a diplômé plus de 4000 étudiants, ingénieur(e)s, licence professionnelle, master et doctorats. Ces derniers constituent un magnifique réseau d’alumni, dont plus de 90% sont des acteurs importants dans la filière bois, dans la construction, les biomatériaux, l’énergie et l’environnement, la production ou encore la logistique pour les industries du bois, le plus souvent en France.
L’AIENSTIB, crée en 1986 et présidée par Éric Mougel, enseignant chercheur et ingénieur ENSTIB, entretient le lien entre les anciens et les actuels étudiants.
Le Campus Bois accueille aux côtés de l’ENSTIB trois laboratoires, le LERMAB, le CRAN et l’Institut Jean Lamour et deux centres de recherche, le CRITT Bois et le CETELOR.
Ils ont fait l’ENSTIB !
Grâce au dévouement et à l’enthousiasme de l’équipe pédagogique, des personnels techniques et administratifs engagés, l’école poursuit son amélioration continue, au service de ses étudiants et de tous les acteurs de la filière bois. Aujourd’hui, le plus beau cadeau, pour toutes celles et ceux qui ont porté le projet ENSTIB depuis 1985, c’est ce que nos étudiants disent de l’école.
En 2025, l’ENSTIB fête ses 40 ans
Le 15 mai les portes du Campus Bois sont grand ouvertes de 13h30 à 18h00, en particulier aux scolaires du CP à la terminale, qui peuvent s’inscrire auprès de Flavie Najean.
Une exposition de 40 panneaux, présentant 40 faits marquant de l’école, est visible dans la halle technique, pour au moins deux ans.